Caspar David Friedrich : la nature sublimée

Ce 8 février 2025, le Metropolitan Museum of Art de New-York a inauguré la première exposition complète consacrée au peintre allemand aux États-Unis, prolongeant ainsi les festivités du jubilé de sa naissance après les trois expositions organisées en Allemagne en 2024.

Oublié à sa mort, Caspar David Friedrich (1774 – 1840) ne fut redécouvert (pour ne pas dire découvert) qu’en 1906, lors de l’Exposition centennale de l’art allemand qui eut lieu à la Nationalgalerie de Berlin et à l’occasion de laquelle 93 de ses œuvres furent dévoilées au public. Cette exposition a permis de le repositionner comme précurseur et maître du romantisme allemand du 19e siècle, dont les paysages métaphysiques allaient marquer durablement l’imaginaire artistique, inspirant peintres, poètes et cinéastes.

J’ai découvert Caspar David Friedrich au lycée – ou peut-être fut-ce au collège — c’était en tout cas en cours de français : son tableau Le Voyageur contemplant une mer de nuages figurait dans le manuel, illustrant sans doute la période romantique. Si je ne garde pas le souvenir précis de la date, je garde la mémoire du sentiment : j’ai tout de suite été captivée par ce voyageur de dos, au-dessus des nuages et du monde ; par cette invitation à la rêverie face à la grandeur silencieuse de la montagne ; par la solitude et la mélancolie qui se dégagent de ce tableau.1

Je dois m’abandonner à ce qui m’entoure et m’unir à mes nuages et mes rochers pour être ce que je suis.

La nature et sa puissance, mort et mélancolie, solitude et impuissance de l’homme, sublime et quête existentielle, sont autant de thèmes et motifs qui s’entremêlent dans ses tableaux, invitant le spectateur à une expérience à la fois spirituelle et artistique. Le peintre cherche à travers ses paysages oniriques à représenter la grandeur de la nature face à la petitesse de l’homme.

En représentant ses personnages de dos, en plus de les rendre anonymes, il invite le spectateur à entrer dans le tableau, à se projeter à la place de cet autre spectateur de peinture ; il crée une atmosphère méditative propice à la réflexion et la contemplation.

Ses paysages ne sont pas de simples représentations de la nature, ce sont des méditations visuelles sur l’existence humaine : les arbres sont le symbole de l’individu solitaire face à la force de la nature ; les montagnes sont les allégories de la foi et de la quête spirituelle ; la lune symbolise l’univers et l’infini ; les souches d’arbres, vestiges du vivant, évoquent le caractère éphémère de l’existence ; la mer et la glace évoquent la puissance de la nature et la fragilité de l’existence humaine.

Caspar David Friedrich est le peintre de la solitude, du silence et de l’infini. Il transforme le paysage en miroir de l’âme et donne forme visible à l’ineffable ; ses compositions, chargées de sens, deviennent des métaphores visuelles exprimant des concepts philosophiques et spirituels profonds.

Pour aller plus loin :


  1. C’est d’ailleurs en partie dans l’espoir d’étudier ses tableaux plus en profondeur que je suis me tournée vers l’histoire de l’art après le lycée. ↩︎

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